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samedi 25 juillet 2015

Bonhomme or not bonhomme ?

Antonin, 4 ans et demi, ne dessine pas de bonhomme.

Mais des araignées, souvent. Et des dragons. Et des camions...


... des chiens...


... des navettes spatiales...

... etc.

Que les psychologues se rassurent : si représentation du bonhomme rime avec construction de soi, mes enfants (se) construisent... oui !

Ici, les "bonshommes" sont toujours en 3D, avec tout ce qu'il faut de têtes, de corps, d'yeux (en perles, en boulons...), de chapeaux (de coquilles d'escargot ou de noix...), voire, dans les productions d'Antonin, de membres (en branchages ou bâtonnets...).

Voici, à titre d'exemple, la production du jour - cadeau de la Damoiselle à son Papa.


Car il faut que je vous dise : Louiselle, à trois ans, ne dessine pas de bonhomme...

;-)

vendredi 17 juillet 2015

Prêt ? Parés !

Magie d'Internet : je suis actuellement en vacances, et à des lieux de mon ordinateur, mais j'ai programmé cette petite publication d'actualité. Je fais, en fait, remonter un ancien article, dûment complété par tous vos ajouts au texte d'origine. Bon, alors ce n'est plus du tout une "petite" liste, mais elle permettra à chacun de faire la sienne en fonction de ses must-have... Voilà qui m'a bien servi à faire mes (gros) bagages ! 
Bonnes vacances à tous ceux qui y sont !! 😊


Avant d'être Maman, j'étais sauvage. J'étais cool. J'étais nomade. J'étais non-consumériste à mort - je suis toujours anti-consommatrice, mais ne suis plus QUOI QUE CE SOIT "à mort" depuis que j'ai des enfants... Je tiens à ma vie ! 😉 J'arpentais nos bords de mer rocheux en pattes d'éph' et en sabots (si,si) en me moquant à mi-voix de toutes ces familles uniformes habillées chez Décathlon (ou assimilés).

Et puis je suis devenue Maman, et il est vrai que ça m'a pris un peu plus de temps que mes copines, mais j'ai compris : chez Décathlon (ou assimilés), ils vendent des bottillons de ski imperméables et hyper chauds à des prix imbattables. Et un geste simple comme de glisser un pantalon de rechange ou un goûter dans le sac à dos peut sauver une promenade - si vous avez un Damoiseau à la maison, vous saurez de quoi je parle ! 😄

Je ne sais pas si notre famille de Normands exilés ressemble à ces dynasties 100% montagnardes que nous croisons à la moindre rando - au fond de moi, je ne l'espère pas (elles semblent tout droit sorties d'une pub pour Go sport !), mais je dois admettre que l'écart se résorbe. C'est bête à dire, mais avant de partir en excursion, à présent, je me prépare ; et je sais maintenant que cette anticipation sera déterminante pour la réussite de notre journée.

Je me doute que j'enfonce des portes ouvertes... Ce que je découvre là, tout le monde le sait depuis le biberon ! N'ayant pas appris, je suis fière de ma check-list actuelle... et je la partage, allons ! Si elle est utile à une personne, ce n'aura pas été en vain, et au moins, je saurai, moi, où la retrouver...

Si je projette une longue marche avec mes enfants, je prépare mon sac... Qui n'aura pas le même contenu selon la saison - les sacs sont plus lourds en été qu'en hiver, vous le saviez, ça, vous ?? 😲


L'équipement spécial "saison froide"

- De bonnes chaussures : les enfants peuvent porter des bottes en caoutchouc ou de bonnes chaussures de marche. Au plein cœur de l'hiver, deux paires de chaussettes superposées ne sont pas de trop pour maintenir le pied au chaud. Si la neige est rare dans la région (Normandie, Normandie chèrie...), on peut faire l'économie de moonboots : les bottes de pluie conviennent très bien en cas de neige, mais il faut veiller à ce qu'elle ne puisse entrer à l'intérieur - des guêtres tricotées amoureusement colmateront les interstices entre les petits mollets et les chaussures.

- Des vêtements chauds : Plusieurs couches de vêtements fins sont plus chaudes qu'un seul gros pull et permettent aux enfants d'ôter un habit sans risquer d'attraper froid. Car je ne sais pas chez vous, mais "se déshabiller dehors" a été un des jeux favoris de mes enfants cet hiver... Et quand je dis "déshabiller", c'est pour de vrai, hein ? Si je les perdais de vue trois minutes au jardin, je les retrouvais nus comme des vers... :-/ Je songe à présent aux collants sous le pantalon, aux manteaux qui se doublent de doudounes, aux T-shirt à manches-longues, aux larges gilets qui s'enfilent sur un petit pull, etc. Au moins, ça leur complique un peu la tâche, s'ils décident de s'éplucher comme des oignons !

- Des vêtements imperméables : par temps de pluie, de neige ou de grand vent, je rajoute par dessus tout cela un K-way et un pantalon de pluie.

- Des gants ou des moufles : indispensables pour manier neige et glaçons plus de quelques minutes. J'ai compris - au bout de 4 ans - qu'ils devaient impérativement être fourrés ET waterproof... et que deux paires par enfant sont nécessaires - je glisse la paire supplémentaire dans le sac lors de nos promenades.

- Des chapeaux : en fait, les têtes de nos bambins sont à couvrir dès que le thermomètre chute sous 10°C. Après avoir testé plusieurs modèles, je suis en mesure d'affirmer que les cagoules (il en existe des mignonnes, avec des oreilles d'ours !) ou les casquettes de trappeur aux ailes fourrées sont idéales...

- Une trousse 1ers secours : crème à l'arnica ou un stick Badaboum pour remettre sur pied le chaleureux guerrier qui vient de chuter (oui, c'est de la magie), quelques pansements, 2 pipettes de sérum physiologique, du Doliprane, un bandage, du désinfectant, une petite paire de ciseaux, de la gaze, du coton et un paquet de mouchoirs.

- Une couche de rechange le cas échéant.

- Une pochette de naturaliste : de la ficelle et un sécateur (on ne coupe pas les arbustes mais on peut couper des branches mortes pour faire une cabane, un radeau etc.), un couteau suisse, des allumettes, une loupe, des jumelles, un mini-livre sur les insectes et les petites bêtes, un autre sur la flore locale (incluant si possible les champignons), un panier à trésors, un carnet et deux crayons.

- Les "doudous" et un petit jouet qui ne prend pas de place, de type petite voiture... On ne sait jamais, si on se retrouvait à attendre aux urgences dans quelques heures, hein... ? :-D

- Un rouleau de scotch argenté pour tout réparer en toutes occasions.

- Un goûter : en hiver, pensez-y, même pour une  courte sortie. Un petit en-cas pourra remonter le moral des troupes frigorifiées, croyez-en mon expérience ! On peut même emporter quelque chose de chaud : un peu de soupe dans une bouteille thermos, des pommes de terre tout juste cuites dans la cendre. Pour ces dernières, voici deux saines alternatives au méchant papier alu : soit on met la pomme de terre dans la cendre - et pas dans les braises !-  et on attend très longtemps, soit on lui fait une coque en argile pour la mettre dans les braises et on attend... longtemps. :-)
Et n'oubliez pas le chocolat et les fruits secs... C'est l'hiver, on a besoin de calories ! ;-)

- Dans le coffre : une couverture, pour les pique-niques improvisés, pour protéger la voiture de la gadoue ou pour couvrir un enfant qui a froid.


L'équipement spécial "saison chaude"

- Une gourde d'eau : même si mes enfants sont de vrais dromadaires, à présent je prends plus que ce que je pense nécessaire. Idéalement, chaque enfant devrait porter sa petite bouteille afin de boire quand il le souhaite. J'essaie de penser à les encourager à prendre quelques petites gorgées régulièrement, plutôt que de boire goulûment en une fois, une fois la soif installée.

- Une crème solaire haute protection : bon, ça je l'ai compris très vite : j'applique une couche avant le départ, et j'emporte le flacon au cas où d'autres applications seraient nécessaires. Non négociable. Ah, et une paire de lunettes de soleil pour chacun des enfants - et qui restent sur leur nez - c'est ma résolution de l'été prochain...

- Des chapeaux : à larges bords, de façon à protéger à la fois le visage et la nuque. Pas toujours facile à trouver, mais pour la saison à venir, c'est décidé : les chapeaux de paille seront résolument à la mode chez nous ! ... si mes enfants acceptent de les conserver sur leurs têtes plus de trois minutes d'affilée, ceci étant une autre histoire... :-/

- Des vêtements adaptés : exit les marcels, je privilégie les T-shirt qui couvrent les épaules. J'emporte un T-shirt à manches longues de rechange, ainsi qu'un pantalon par enfant si nous partons pour une excursion longue. Si le temps est instable (ou que nous sommes dans le Nord...), j'ajoute des gilet et les K-way (ciré/imperméables...) dans le sac.

- Un ballon, des bottes en caoutchouc et une combinaison de bain pour patauger dans les rivières. 

- Une trousse 1ers secours : crème à l'arnica ou un stick Badaboum pour remettre le chaleureux guerrier qui vient de chuter... sur pied (oui, c'est de la magie), quelques pansements, du Doliprane, un bandage, du désinfectant, une petite paire de ciseaux, de la gaze, du coton, un paquet de mouchoirs. Pensez au répulsif antimoustique ou à l'huile essentielle de citronnelle (pas avant 3 ans) : à appliquer sous les vêtements, là où la peau n'est pas exposée au soleil (jamais sur le visage !). Si vous en avez une, glissez en surplus dans votre sac une crème apaisante en cas de piqure d'insectes. Chez nous, elle s'est mainte fois avérée utile !

- Une couche de rechange le cas échéant.

- Une pochette de naturaliste : de la ficelle et un sécateur (on ne coupe pas les arbustes mais on peut couper des branches mortes pour faire une cabane, un radeau etc.), un couteau suisse, des allumettes, une loupe, des jumelles, un mini-livre sur les insectes et les petites bêtes, un autre sur la flore locale (incluant si possible les champignons), un panier à trésors, un carnet et deux crayons.

- Les doudous et un petit jouet qui ne prend pas de place, de type petite voiture...

- Un rouleau de scotch argenté pour tout réparer en toutes occasion. 

- Un goûter : bien sûr, rien qui ne nécessite d'être conservé au frais ! ;-)

- Dans le coffre : une couverture, pour les pique niques improvisés, pour protéger la voiture de la gadoue ou pour couvrir un enfant qui a froid.

Sur ce, je vous souhaite de très bonnes vacances, et de belles balades, quel que soit le temps ! :-)

vendredi 10 juillet 2015

La période sensible de la bouteille de lait


Haha, vous ne la connaissez pas cette période sensible-là, hein ? :-D

Je m'explique : 

Cela survient souvent en Grande section - ou plus tôt ou plus tard sans qu'il faille bien sûr s'en inquiéter. Un matin, au moment où l'enseignant s’apprête à fermer la porte de sa classe pour commencer l'accueil, un couple de parents échevelés se précipite :

"Pardon ! Pardon ! Nous sommes en retard !!... C'est que ce matin, au petit déjeuner, il a fallu lire TOUTE la bouteille de lait. Impossible de décoller avant cela, c'était non négociable !!". Et ayant repris leur souffle, les parents concluent, un peu étonnés de ne pas l'avoir remarqué plus tôt : "C'est fou TOUT ce qu'il y a écrit sur une simple bouteille de lait, quand même..."

Voilà. La période sensible de la bouteille de lait, c'est quand l'enfant décide de TOUT déchiffrer. Les inscriptions sur les emballages, les enseignes des magasins, les affiches électorales, tous les écrits qui saturent notre environnement y passent.

Antonin n'est plus "bloqué" : il est à présent aussi à l'aise avec les minuscules qu'avec les lettres capitales, et me surprend même à reconnaitre sans souci des polices assez baroques. 

Alors, tout au long du jour, la voix ânonante du Damoiseau chante en sourdine les mots du monde - des mots souvent bien étranges d'ailleurs : "Lenovo", "Lift'Argan", "Nikon", "Savora"...

Antonin a une préférence pour les noms d'auteurs japonais - il y en a beaucoup chez nous, tant dans les bibliothèques des enfants que dans celles des adultes : Taiyou Matsumoto, Hayao Miyazaki, Taro Gomi,  Junichirô Tanizaki... Il sont faciles à lire et vraiment rigolos !!

En voiture, Antonin regrette : "Il allait trop vite, le camion, je n'ai pas pu lire ce qu'il y avait écrit sur sa remorque...".

A brûle pourpoint, le Damoiseau pose des questions étonnantes : "Maman, dans "Atlantique", est-ce qu'il y a un "a" à la fin qu'on n'entend pas ?" - Ah, d'accord, il a le mot "Atlantica" devant les yeux, je comprends mieux...

La main d'Antonin aussi a franchi un palier : les premières phrases surgissent. Saurez-vous déchiffrer le message ci-dessous ? ;-)


Je vous donne un premier indice : c'est ICI.
Et une petite aide supplémentaire :


Ce texte-là a été produit le lendemain du premier, après une explication rapide sur la segmentation des mots. 

Mais là, ça devient trop facile, non ? ;-)

jeudi 9 juillet 2015

Calligraphie - les cent langages


On m'a souvent demandé s'il existait des ouvrages pratiques reggians  en français, et jusqu'à récemment,  je devais bien admettre que je n'en connaissais aucun... Et puis,  j'ai découvert la traduction des œuvres d'Howard Gardner

Howard Gardner dit en substance - je paraphrase :

"Bon. Chaque enfant est unique. Il nous sera bien sûr impossible de dessiner une carte de chaque intelligence particulière. Elles sont trop nombreuses. Il existe cent intelligences, que dis-je, mille, ou dix mille intelligences... Il en existe en fait une infinité.
Face à cette complexité, l'éducateur s'interroge : Comment expliquer que des enfants intelligents soient en échec scolaire ? Comment parvenir à intéresser tout le monde ? Comment boucler le programme en tenant compte de la diversité des élèves ?
Voilà : réduisons ces entrées dans le savoir à huit. Nous savons qu'elles sont bien plus nombreuses que cela, en réalité. Mais se noyer sous leurs nuances multiples ne nous aidera pas à construire des propositions concrètes au sein de la classe. Or, voilà ce que nous voulons : guider, proposer des réponses adaptées aux questions fondamentales. La théorie des intelligences multiples est une simplification efficiente."

Avant de lire Howard Gardner, j'étais méfiante : d'abord ce terme "d'intelligence", dont je comprends aujourd'hui qu'il n'a pas été choisi sans une certaine provocation, et que loin de renvoyer à un mode de digestion passif du savoir, il désigne une préhension particulière du monde - un langage.


Deuxième préjugé dépassé : Howard Gardner se positionne clairement contre les tests - auxquels, allez savoir pourquoi, sa théorie, a priori, me renvoyait irrésistiblement. Qu'un langage soit dominant chez un individu, c'est possible, mais pas obligatoire. D'ailleurs, au cours de notre vie, nous changeons souvent plusieurs fois de canaux d'expression privilégiés. Si, par l'observation concrète, l'éducateur voit s'affirmer une relation particulière entre cet élève et son savoir, sa mission est double : privilégier  la sémantique chère à l'enfant (on propose une entrée logico-mathématique dans chaque science à un élève ayant ce "langage"), mais aussi l'ouvrir à d'autres systèmes de signes : on valorise la compréhension par le corps, ou par la relation avec autrui, parce qu'elles vont venir compléter, enrichir et faire évoluer la personnalité du petit logicien, en musclant d'autres zones cervicales qui, à leur tour, nourriront son potentiel "intelligence/langage"...

Si vous êtes parvenus à la fin de ce développement un tantinet technique, vous l'avez compris : cette théorie me passionne, et voilà deux mois que je n'ai de cesse d'y réfléchir et de la mettre en pratique. Je me suis amusée, ces dernières semaines, à proposer à mes enfants des activités de calligraphie stimulant diverses syntaxes cognitives - séquence directement inspirée du Guide pour enseigner autrement, p. 41 à 48.

Voici donc une série de séances courtes et ludiques visant la maitrise des gestes de l'écriture... façon Howard Gardner. :-)

1. Le langage introspectif (ou intelligence intrapersonnelle) :


C'est le fameux "Connais toi toi-même". Certaines personnes ont une vue aiguisée de leurs capacités, de leurs peurs et de leurs objectifs. Elles savent de qu'elles ressentent et pourquoi ; elles respectent et ménagent cette identité et ne se perdent pas au contact d'autrui.

Calligraphier, dans cette optique, c'est très simple : on fournit à l'enfant le matériel nécessaire (papier, peinture, brosses, rouleaux, coton-tige, crayons, craies grasses, feutres, crayons à papier, stylos... mais aussi pâte à modeler...) et on laisse faire. L'enfant décide, choisit son outil et réalise des traces comme bon lui semble.

C'est la porte d'entrée préférée des "unschollers" - et la mienne aussi ! ;-)

2. Le langage musical (ou l'intelligence rythmique) :


L'intelligence musicale ne concerne pas uniquement les musiciens. Bien des enfants qui n'ont jamais pratiqué d'instrument ni suivi de cours de solfège se révèlent excellents dans ce domaine : ils dansent en rythme, ils ont sensibles aux intentions, aux tonalités, et ils sont capables de composer assez rapidement pour peu qu'on leur en donne les moyens. J'ai rencontré dans ma pratique des élèves de ce type... surtout là on ne les attendait pas !! : parmi les plus en difficulté scolaire... Cela donne à réfléchir sur la manière dont on enseigne, n'est-ce pas ? :-/

Pour muscler ce langage chez Antonin, j'ai essayé de lui proposer la séance que j'avais vécue avec mes élèves au musée de Grenoble : je jouais d'un instrument, et il représentait le son produit. Il a commencé par associer le son sec des castagnettes au noir - super, non ? - mais n'a plus changé de couleur par la suite. J'ai dû me rendre à l'évidence en l'observant : ce n'était pas LE SON qu'Antonin dessinait, mais LE GESTE que je faisais en jouant (secouer de haut en bas, tourner, etc.). A refaire un peu plus tard, donc, mais c'était très sympa quand même ! :-)

3. Le langage verbal (ou l'intelligence linguistique) :


Ah, les verbaux !! Je les connais bien, j'en suis. ;-)

Ce type de personne comprend mieux en verbalisant ; les choses s'éclairent quand on en parle, à l'oral ou à l'écrit. Certains d'entre les verbaux sont doués pour les langues étrangères - mais ce n'est pas systématique. Les verbaux aiment parler, écrire, prêcher, argumenter. Ils apprennent mieux si les idées sont exprimées en mots (oraux ou écrits).

Pour apprendre à écrire d'un point de vue linguistique, il ne faut pas hésiter à décrire les tracés. Le matériel montessorien des lettres rugueuses se prête tout à fait à cet usage absolument non-montessorien (Je crois qu'un des succès de cette pédagogie est qu'elle s'adresse à toutes les intelligences SAUF la verbale, qui est justement celle que l'école classique valorise le plus). Donc, en même temps que le doigt parcourt la lettre, on décrit le geste en introduisant le vocabulaire spécifique : "jambe", "canne", "barre", "boucle", etc.

Même si pour l'instant ce type d'approche n'est pas dominant chez Antonin, l'apport de ce vocabulaire le dote d'outils pour décrire ses intentions et ses tentatives : "Là, je monte, je fais une boucle, je redescends, je fais une petite queue...".

4. Le langage catégorisant (ou l'intelligence naturaliste) :


Le petit naturaliste aime trier et classer. Il est attiré sur les objets du monde (oiseaux, nuages, arbres...) mais sa passion de la catégorisation peut s'étendre à n'importe quel sujet : drapeaux, blasons, voitures, composants informatiques... Ce langage identifie - qu'il s'agisse d'une graine ou d'un widget, les zones du cerveau sollicitées seraient les mêmes.


Pour stimuler cette intelligence, donc, on propose à l'enfant de trier. Ici, Antonin opère des rapprochements entre ses cartes graphiques. Celles qui nécessitent un geste qui tourne, celles dont le trait va tout droit... C'est aussi l'occasion d'énumérer les motifs graphiques qu'Antonin connait, de les "collecter" en les décrivant et en les reproduisant... et d'enrichir notre répertoire par de nouvelles cartes.

5. Le langage relationnel (ou intelligence interpersonnelle) :


L'intelligence relationnelle permet de comprendre les autres - leurs expressions non-verbales, leurs motivations, leurs désirs et leurs humeurs. Il s'agit d'un langage aisé à nourrir en groupe-classe... C'est évidemment plus difficile au sein d'une famille, si nombreuse soit-elle...


Ici, il s'agissait de remplir un large espace feuille à deux - faire des traces sur le même support avec des outils de son choix. On peut cadrer un peu le jeu en proposant de remplir une zone avec une carte graphique tirée au sort - des cartes "couleurs" et des cartes "outils" (feutres, pastels, crayons divers...) peuvent également être proposées.


Pour nous, nos cartes graphiques étaient proposées pour l'inspiration, et le jeu n'était pas encadré par des contraintes telles que tirage au sort ou tour de rôle... Mais ce serait intéressant à tester aussi ! :-)


Dans la collaboration autour d'une même tâche, autrui devient une partie constitutive de notre "espace cognitif" (pour parler comme Vygotsky). Antonin et Louiselle sont chacun fortement ego-centré comme le sont les enfants de leurs âges ; mais je remarque aussi que leur construction personnelle se fait de façon conjointe à celle de l'autre - ils sont sans cesse en interaction, et leurs préoccupations, à 16 mois d'écart, sont toujours extrêmement proches. Cette double tendance ("moi d'abord - mais jamais sans l'autre") se retrouve dans leurs jeux et dans leurs travaux : des temps de "chacun pour soi" (plutôt courts et souvent apparents seulement) alternent avec les moments d'influence réciproque, de discussion (et de dispute...), de choix communs...


D'un point de vue graphique, en ce moment, chaque enfant a son répertoire privilégié : Antonin dessine des spirales et des étoiles, Louiselle trace des hachures et des points. Mais chacun a aussi à cœur d'imiter l'autre, et s'ouvre ainsi à d'autres gestes...


Au final : un beau mélange de styles et d'influences réciproques !


Pour ce genre d'activité, c'est évident : plus on est de fous, plus on rit. C'est bien ce que s'est dit cette lucane femelle qui est venu voir tout cela de plus près...


Et nous a fait l'honneur de rajouter l'ombre chinoise de ses griffes, de ses antennes et de ses mandibules au motif collectif, le temps de le  traverser... pour la plus grande joie des enfants ! ;-)

6. Le langage spatial (ou l'intelligence spatiale)  :


L'intelligence spatiale est une compétence large : c'est elle qui permet d'évaluer correctement les distances ou de se repérer dans l'espace (le fameux "sens de l'orientation"), c'est elle qui est à l’œuvre en géométrie ou lors des jeux de cubes,  mais aussi lorsqu'on demande à l'enfant de rapprocher deux objets identiques ou analogues qui sont éloignés physiquement. Les chasses aux trésors et autres énigmes physiques sont des voies d'apprentissage royales pour les apprenants privilégiant ce type de langage, mais aussi les reconstitutions (restaurer un vase, faire un puzzle...) ou les pliages (origami, emballages de cadeaux...).


Le jeu proposé fut le suivant : nous avons disposé dans l'herbe des Smartmax à intervalles réguliers, au-dessus desquels il s'agissait de sauter.


(Ne vous inquiétez pas pour le chat, tout ce remue-ménage n'a absolument pas interrompu sa sieste, pensez-vous. Il n'a seulement pas cillé de la moustache.)

Mon  objectif était de proposer ensuite un exercice de graphisme sur feuille, qui reprendrait dans le plan le geste que les enfants avaient vécu "en grand".

J'aurais tracé des pointillés - représentant nos barres Smartmax,
et les enfants auraient dessiné les "sauts" par dessus.



Bon, la séance a pris un autre tour : Antonin est allé cherché son vélo et s'est mis à slalomer entre les barres.


Et puisque j'avais annoncé en début d'exercice que nous dessinerions le mouvement effectué, il s'est ensuite précipité sur ses feutres et a réalisé le dessin des obstacles et de son parcours tout seul :

Ah, il semblerait que le langage spatial soit assez développé chez le Damoiseau... ;-)

7. Le langage du corps (ou intelligence kinesthésique) :


Il y a ceux qui ne s’intéressent pas trop à la manière dont leur corps fonctionne, et qui n'ont aucune idée de leurs aptitudes physiques. Et puis, il y ceux qui savent. Ils semblent être nés en le sachant, et utilisent leurs capacités corporelles naturellement, sans paraitre y penser. La pédagogie Montessori valorise particulièrement ce langage - les tracés dans le sable et les lettres rugueuses sont d'excellents outils pour apprendre à écrire aux enfants physiques. Le langage du corps, c'est l'athlétisme, la gymnastique, la sophrologie, la sculpture sur bois ou le modelage...

Antonin : Lettres

Mais aussi : la danse. Écrire des lettres ou des signes en grand dans l'espace en utilisant tout son corps, et toutes les dimensions de l'espace (le ras du sol, le plus haut que soi, l'avant, l'arrière...). Tracer à l'aide d'un ruban de gymnastique. Mimer la pluie qui tombe. Rouler sur le sol comme une feuille morte. Reproduire en l'air les motifs graphiques connus, avec la main, le doigts, le pied... ou n'importe quelle autre partie du corps.

"O"

Il est à noter que cette entrée par le corps est la seule que Louiselle daigne emprunter pour l'instant. Elle connait le tracé de toutes ses lettres et chiffres rugueux, se précipite dès que je propose une mise en corps (globale ou fine) alors qu'elle a tendance à se détourner des autres activités assez vite. La Damoiselle est une jeune fille très physique, ce n'est pas une surprise, et ce sera un canal à valoriser dans ses apprentissages ultérieurs.

Louiselle : Lignes

8. Le langage logique (ou l'intelligence mathématique) :


Les "matheux", comme on les appelle souvent, sont à l'aise dans la manipulation des nombres, des patrons, des algorithmes. Cette intelligence est toute clarté et scientificité analytique. Elle abstrait, c'est à dire qu'elle extrait du réel des formes pures, dépouillées des prédicats qui l'encombrent au vu du raisonnement effectué.

Avec les petits, l'activité  logique peut par exemple prendre la forme d'une chasse aux motifs graphiques dans le jardin ou la maison. Et sans surprise, c'est une activité qui a très longuement mobilisé mon Damoiseau, qui apprécie toujours beaucoup ce type d'entrées logiques.

C'était donc parti pour une chasse aux cercles...


... une chasse aux lignes...


... aux quadrillages...



... et aux lettres !

X, Y, H, O et U

Une variante de cet exercice - et qui fait travailler la main ! - consiste à fournir des documents pour que l'enfant y repère un motif graphique récurrent, des lettres...

Voyez : je commence à embêter Louiselle quant à la tenue de son outil scripteur...

Ici, j'ai réquisitionné nos revues d'art...


... dans les pages desquelles les enfants ont décalqué librement les formes et motifs de leur choix.


Ah, le papier calque ! Voilà encore un matériel reggian au sens plein : peu onéreux, facile à trouver, plein de potentialité et de magie ! ;-)


Ainsi s'achève mon petit tour des intelligences multiples illustrées... Vous constaterez avec moi à quel point tous ces langages sont étroitement imbriqués... Et comment quelques minutes de reflexion sous cet angle peut nous aider, en tant qu'éducateur, à varier nos pratiques...

Que du bonheur ! :-)

dimanche 5 juillet 2015

Dans ma classe...


Ne vous inquiétez pas, ce blog est et restera dédié à nos activités familiales, mais pour aujourd'hui, je craque. Et comme je ne gage pas de ne pas re-craquer à l'avenir, j'inaugure une nouvelle rubrique relative à mes bidouillages pédagogiques à l'école : "Dans ma classe".

Pour ma décharge, je viens de vivre 7 semaines d'enchantement. C'est définitif : je dois avoir une bonne étoile qui prend soin de moi quelque part. J'ai eu un remplacement long dès mon retour de congé parental, et je suis restée dans la même école toute la période. La classe de CE2/CM1 qui m'est échue fut une classe merveilleuse : bon niveau scolaire, grande camaraderie, vraie gentillesse... Des élèves en or. L'équipe enseignante m'accueille à bras ouvert, les parents me couvrent de retours enthousiastes, bref... Avant-hier, le dernier jour, tout le monde pleurait mon départ - enfin, surtout moi, et au sens propre... :-(

Pourtant, ma faible visibilité en matière de progression (mon remplacement étant reconduit de semaine en semaine) ne m'a pas autorisée à me lancer dans les grands projets et révolutions que j'affectionne tant. Le mode d'enseignement fut classique, mais il y eu tout de même quelques activités sympas dont j'aimerais garder trace... Car les enfants me l'ont dit : ces séquences-là, eux ne les oublieront jamais, promis ! ;-)

Jeux de cour

Dans ma classe de CE2/CM1, période 5, il y eut :

- Une belle randonnée d'une journée dans la campagne alentour et une étude de la flore locale.


Les enfants ont collecté et observé des spécimens (la loupe a rencontré un énorme succès !), ils les ont ensuite fait sécher, triés par couleur puis par famille, identifiés, collés, dessinés, légendés, et ils ont relié le tout. Ils sont ensuite allés présenter le produit fini aux autres classes - avec beaucoup de fierté !

Feuillets en cours d'élaboration

- Du modelage :

"Tête de souris"

Au cours de cette même promenade, nous avons eu la chance de traverser un chemin creux aux parois d'argile : une glaise magnifique, fraiche, ocre puis rouge, que les enfants ont immédiatement manipulée. Nous avons décidé d'en rapporter une petite boule à l'école et les élèves l'ont travaillée chacun leur tour. L’œuvre éphémère était ensuite étiquetée, photographiée, légendée et commentée par l'enfant. Le tout a constitué une très belle affiche que les enfants des autres classes ont beaucoup admirée.

Fait significatif : deux enfants de la classe, en grave difficulté scolaire, sont les seuls à être restés dans le plan : ils ont roulé des boudins, avec lesquels ils ont confectionné un dessin plat - et très affectif : "bonhomme" ("C'est moi." a légendé l'un d'eux) et personnage à côté de sa maison (il s'agit d'ailleurs d'un enfant qui ne cesse de déménager...)... Alors, je ne ferai pas de psychologie à deux francs, mais je le réaffirme : il y aura toujours un "spot" argile dans ma classe. Parce que c'est sensoriel, parce ça permet de s'exprimer efficacement et autrement, et parce que petit à petit j'ai bon espoir que des enfants de ce type s'extraient du plan et se mettent à penser en 3D.

-  De la géométrie concrète : 


J'ai introduit mes propres solides comme je l'ai fait à la maison. Après une longue phase de manipulation libre, nous avons enchainé sur des jeux de reconnaissance (jeu de Kim, sac à mystère...), puis une belle séance de peinture. Pour la suite, j'ai suivi cette logique-là. Gros succès.


Et la dernière semaine de classe, j'ai proposé quelques pseudo-globes et paper toys à fabriquer... Les enfants ont adoré !! :-)

- Une visite au musée d'art de Grenoble. L'atelier ("Sons et formes") était proposé par le personnel du musée et je n'ai rien eu à gérer. Mais je me suis régalée ! Les enfants ont commencé par s’asseoir devant l'immense Grégoire pape de Rubens, ils l'ont décrit rapidement avant d'écouter un extrait du Messie de Haendal, quasi-comporain de l’œuvre. Le but était de trouver les ressemblances entre le morceau et le tableau, ils s'en sont super bien sortis ! :-)


Après quoi, direction l'atelier. La classe est divisée en petits groupes. L'un d'eux joue des petites percussions variées (un adulte fait le chef d'orchestre) et les autres dessinent, au pastel gras, sur de grandes feuilles de papier blanc. La consigne : choisir sa couleur et son tracé en fonction du son entendu. Certains enfants ont du mal à se lancer, mais bientôt on ne peut plus les arrêter, et ils s'éclatent ! Deux œuvres sont ensuite choisies, affichées, et les encadrants demandent aux enfants de chanter et de jouer leur travail (percussions corporelles, coups sur la table, au sol...) comme s'il s'agissait d'une partition. Splendide.


La visite s'achève par un petit bonjour au Complexité simple (Ambiguïté) de Kandinsky, qui disait avoir, par ce tableau, représenté de la musique.


Le musée de Grenoble a fait lire le tableau par un musicien qui l'a joué... avec les instruments que les enfants viennent de manipuler !! Voilà ce que j'appelle une séance bien ficelée ! La visite se termine par l'écoute de la production devant le tableau, et les remarques des enfants.

Il fallait voir mes élèves, super polis, remercier les encadrants avec chaleur : "Au revoir, et merci,  nous avons passé une très bonne matinée !!". :-D

- Une visite au musée archéologique de Grenoble. L'entrée est libre, et la visite est spectaculaire, quoique courte. Nous avions étudié le travail de l'archéologue en amont, et j'avais concocté un petit jeu de piste à réaliser par groupes et qui a permis d'étirer la visite sur une heure et demi ! Les élèves ont adoré chercher les indices et recevoir, à la fin, leur diplôme du jeune archéologue ! :-)


- Une séquence scientifique "Ombres et Lumière" que j'ai essayé de rendre la plus "Reggio" possible - le thème s'y prêtait ! :-D

D'abord, beaucoup de mises en corps : de petits jeux sous le soleil (se cacher dans l'ombre de quelqu'un d'autre, faire disparaitre son ombre...).




S'en sont suivies dse manipulations en classe pour construire le nécessaire alignement source/objet/ombre...


Pas de lampe de poche dans l'école... Plus-que-motivés, les enfants ont apportés les leurs... et on en a eu plus qu'il n'en fallait ! :-D

La manipulation était rythmée par quelques questions à résoudre : "Comment faire pour changer la taille de l'ombre ? Peut-on avoir plusieurs ombres ?" etc.


Enfin, une magnifique "documentation" sur l'investigation menée par enfants, écrite par eux-mêmes et affichée dans les couloirs de l'école.

Vue d'ensemble

Dessins et reflexions

Photographies des jeux en extérieur

Problèmes - Institutionnalisation

- Du land art :

Voilà, depuis l'aube de l'humanité, c'est pareil. Donnez un morceau de bois et quelques cailloux aux enfants, et ils refont le monde...

Pendant les récréations, tout à fait spontanément, les CP font des "cabanes", plans tracés à l'aide de feuilles, dans lesquels ils jouent "à la maison" : "Viens dans la cuisine ! Attends, j'ai oublié un truc au salon !", etc.


Les CE1 construisent des abris miniatures si charmants que je leur ai prêté mes lutins Waldorf - ils étaient bien contents, les lutins, d'avoir un chez-eux si mignon.


Voyant que je valorisais les productions des plus petits, mes élèves n'ont pas voulu être en reste et s'y sont mis. Voilà une belle cabane suspendue concoctée par mes CE2...


Beautiful ! :-)


Voilà.

Il ne me reste plus qu'à me vider la tête de tout cela et cesser de me tracasser pour la rentrée (poste de remplaçante non spécifié à ce jour). Je dois à présent me reposer et profiter de ce bel été avec ma petite famille ! :-)